guerre froide

État de tension qui opposa, de 1945 à 1990, les États-Unis, l'URSS et leurs alliés respectifs, qui formaient deux blocs dotés de moyens militaires considérables et défendant des systèmes idéologiques et économiques antinomiques.

Introduction

La guerre froide a pour conséquence un effet de bipolarisation dans la mesure où chacun des adversaires attire dans sa sphère d'influence les États moins puissants. Bien que ce phénomène affecte surtout l'Europe, enjeu principal, il se répercute également sur le processus de décolonisation, puis sur les affrontements régionaux qui se développent dans le tiers-monde. Dès 1949, les États-Unis et l'URSS disposent de l'arme nucléaire et, dans les années suivantes, de vecteurs balistiques pouvant transporter cette arme à environ 8 000 km. Cette situation nouvelle, dans la mesure où elle crée pour chacun le risque de devoir subir des dommages intolérables, interdit que l'on recoure à la guerre directe pour dénouer la situation de rivalité. En revanche, les manœuvres indirectes (guerres périphériques par alliés interposés), les affrontements économiques et politico-idéologiques (guerre psychologique) prennent une importance accrue.

Engagement et formation des blocs (1945-1962)

La défaite de l'Allemagne, l'effondrement de la France et l'affaiblissement du Royaume-Uni créent, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, une rupture des équilibres traditionnels sur le continent. En dépit des immenses destructions qu'elle a subies, l'Union soviétique dispose désormais d'une écrasante suprématie. Ayant gagné 600 000 km2 en Europe, elle dispose, à l'été 1946, d'une armée de 100 divisions, soit 4 millions d'hommes, et de 6 000 avions, tandis que les Anglo-Saxons procèdent à la démobilisation rapide de leurs forces et à la reconversion des industries de guerre. En mars 1946, Churchill, dans son discours de Fulton dit « du rideau de fer », met en garde contre le risque de domination communiste sur une Europe dont la division s'aggrave. En effet, une succession de crises d'intensité croissante (Iran, Turquie, Grèce) et la mise en place de régimes procommunistes dans les pays d'Europe orientale occupés par l'Armée rouge conduisent le nouveau président des États-Unis, Harry Truman, à réviser la traditionnelle politique isolationniste des États-Unis (doctrine Truman, mars 1947) et à adopter une stratégie d'« endiguement ».

1947. En juin, le général Marshall annonce un plan d'aide pour tous les pays européens qui en feront la demande. En Europe de l'Est, les partis communistes se regroupent dans le Kominform formé en septembre.

1948. La prise du pouvoir par les communistes en Tchécoslovaquie (« coup de Prague ») de février-mars 1948 qui voit basculer le dernier régime démocratique d'Europe centrale, provoque une intense anxiété chez les Européens de l'Ouest et conduit d'abord à la formation du pacte de Bruxelles (mars), puis à l'engagement de pourparlers en vue d'une alliance défensive avec les États-Unis.

1949. Le blocus de Berlin (juin 1948-mai 1949) aggrave la tension et favorise la conclusion rapide du traité de l'Atlantique Nord (OTAN) en avril 1949. La formation de deux États allemands antagonistes achève d'entériner la division de l'Europe.

La victoire des communistes chinois et l'attaque de la Corée du Sud par Kim Il-sung, leader communiste de la Corée du Nord, confèrent au conflit sa dimension intercontinentale.

1955. L'intégration de l'Allemagne fédérale dans l'OTAN provoque la formation par les Soviétiques de l'Organisation du pacte de Varsovie.

1956. L'URSS intervient en Hongrie. Les États-Unis intensifient leur production d'armements nucléaires.

1961-1963. La deuxième crise de Berlin (1961-1963) et la crise de Cuba (septembre 1962) se situent dans la perspective de cette compétition où chacun teste les capacités de l'autre et pousse le plus loin possible ses pions jusqu'à rencontrer les limites que son adversaire a décidé de fixer.

Stabilisation de l'affrontement (1963-1978)

À partir de 1965, Américains et Soviétiques se rencontrent régulièrement. Certaines de leurs négociations aboutissent, visant à réduire les risques de conflit nucléaire, particulièrement sur le théâtre majeur de la confrontation, l'Europe : la Conférence d'Helsinki sur la sécurité et la coopération en Europe (CSCE) constitue, en août 1975, une sorte de point d'orgue de ces manœuvres. Il en va tout autrement sur les périphéries, où se développe sous des formes variées une compétition violente bien qu'indirecte : en Indochine, au Moyen-Orient, en Afrique, par alliés interposés auxquels chacun apporte une assistance plus ou moins importante.

Intensification et dénouement (1979-1990)

L'affaiblissement des États-Unis dû à leur la défaite au Viêt Nam s'accompagne d'un développement croissant de la puissance militaire soviétique, qui culmine avec le déploiement des missiles balistiques SS-20 en Europe (1977) et l'invasion de l'Afghanistan (décembre 1979). Le refus du Congrès américain de ratifier le traité SALT II, signé en juin 1979 par Leonid Brejnev et Jimmy Carter, la relance des programmes de modernisation des forces nucléaires stratégiques des États-Unis et l'embargo céréalier à l'encontre de l'URSS marquent le début d'une dégradation très forte des relations entre les deux Grands. Fin 1979, l'OTAN proclame son intention de riposter au déploiement des SS-20 par l'installation en Europe occidentale de missiles Pershing II. Le président Carter affirme le caractère vital du golfe Persique pour les États-Unis et leur détermination à s'y porter en force au cas où une puissance extérieure chercherait à en prendre le contrôle à son profit. L'arrivée à la présidence de Ronald Reagan (janvier 1981) ouvre une phase nouvelle : les États-Unis lancent l'Initiative de défense stratégique (IDS). Cette dernière vise à placer l'Union soviétique devant une impasse : renoncer à faire jeu égal avec les États-Unis ou s'épuiser économiquement afin de rattraper son handicap dans la course technologique. Cette inflexion s'appuie sur une importante augmentation des dépenses militaires américaines entre 1979 et 1983.

1983. La tension monte considérablement tant sur le théâtre principal européen, fortement agité par la crise des euromissiles, que sur les périphéries. Les États-Unis interviennent violemment à la Grenade (Caraïbes) pour prévenir l'établissement d'un régime procastriste, tandis qu'ils soutiennent partout dans le monde les guérillas anticommunistes (Nicaragua, Afghanistan, Mozambique).

Sur fond de grave crise économique intérieure, Mikhaïl Gorbatchev, qui dirige l'Union soviétique à partir de 1985, décide de revenir à une forme de compétition stabilisée. Les effets de la fin de la guerre froide sont discernables entre novembre 1989 (démantèlement du mur de Berlin) et septembre 1990 (signature du traité d'unification allemande, le 12). Le communisme s'effondre en Europe orientale et entre en crise grave en URSS même. Concrètement, la situation géostratégique issue de la Seconde Guerre mondiale, qui faisait du centre de l'Europe une base de départ pour les armées soviétiques, disparaît. En avril 1991, la dissolution de la composante militaire du traité de Varsovie entérine un état de fait.