nom masculin
Au sens strict, en littérature et en France, le classicisme représente la période qui s'étend de 1661 à 1685, ce qui correspond à la toute-puissance de la monarchie absolue. De même que la gloire de Louis XIV est l'aboutissement de la lente évolution de la monarchie sous Henri IV, puis sous Louis XIII, de même le classicisme est le point de confluence de réflexions d'écrivains occupés par des convictions morales et esthétiques communes. Quels sont les grands écrivains du classicisme ? On pense avant tout à Molière, à Racine, à Boileau, à La Fontaine et à Bossuet. Leur communauté de goût, qui aboutit au remarquable essor de la prose et de la poésie françaises, s'exprime dans quelques grands principes qui fixent les caractères généraux du classicisme. Boileau s'en fait l'écho en 1674 dans son Art poétique.
D'abord, tous les écrivains classiques sont d'accord pour prôner l'imitation des Anciens, c'est-à-dire l'imitation des thèmes abordés par les écrivains de l'Antiquité gréco-latine. Ensuite, si « la principale règle est de plaire et de toucher » (Racine, préface de Bérénice, 1670), on ne peut toutefois y parvenir qu'en restant soucieux de la vérité et du naturel, et, inversement, en se détournant du singulier et de l'exceptionnel. Il s'agit donc de suivre la nature. Il s'agit aussi de chercher l'homme permanent et éternel par-delà les particularités, dans une constante quête de la vraisemblance. Ainsi, l'ordre et la clarté, l'équilibre et la perfection, l'analyse et la vérité, la raison et la vraisemblance, la recherche du beau absolu et du bien sont les valeurs principales du classicisme. Cette pureté morale se double d'une pureté formelle avec le respect d'une langue fixe et de certaines conventions – comme celle, au théâtre, des « trois unités » (temps, lieu, action).
Hors de France, le classicisme marque moins un moment de la création littéraire qu'une catégorie esthétique. S'il existe des périodes phares dans les littératures étrangères, elles sont soit antérieures au siècle de Louis XIV (pour l'Italie, l'Espagne, l'Angleterre), soit postérieures (pour l'Allemagne). Et, dans de nombreux pays, le renouvellement de la littérature sera le plus souvent le fruit d'une réaction contre le classicisme français.
L'idéal de clarté et de stabilité du classicisme sera bouleversé par deux crises majeures de la pensée et de la sensibilité : la révolution scientifique, qui, à la suite de Newton, révèle l'existence et la cohérence de mondes infinis ; puis la découverte, due aux écrivains romantiques, des abîmes intérieurs de la personnalité..
En matière de beaux-arts, le classicisme puise volontiers son inspiration dans l'antique. Les premiers maîtres sont les Italiens de la seconde Renaissance : en architecture, Bramante, les Sangallo puis Palladio ; en peinture, Raphaël et Titien, suivis, après la phase du maniérisme, par les Carrache et leurs élèves, créateurs de l'académisme. Alors même que l'Italie se voue au baroque, le classicisme se répand en Europe, notamm. en Angleterre, aux Pays-Bas et plus encore en France, où son triomphe va de pair avec celui de l'absolutisme de Louis XIV.
Les Mansart l'expriment pleinement, de même que Poussin et Le Lorrain, établis à Rome ; l'effort de coordination mené par Le Brun, par les Académies royales et par Colbert va l'ériger en doctrine officielle à partir de 1660. L'un de ses manifestes est la « colonnade » du Louvre, attribuée à Claude Perrault (1667) et l'un de ses aboutissements l'œuvre de Girardon, qui embellit de statues les jardins de Le Nôtre à Versailles. Par-delà l'époque rocaille, le classicisme architectural français atteindra à partir de 1750, avec J. A. Gabriel, sa plus haute expression de mesure et d'harmonie. Dans la seconde moitié du XVIIIe s., une meilleure connaissance de l'Antiquité suscite le néoclassicisme des David, Canova, Ledoux puis Schinkel, etc.
Dans le domaine musical, on peut distinguer le classicisme versaillais de Lully à Rameau (aujourd'hui apparenté à la musique baroque) et le classicisme viennois de Haydn, Mozart et Beethoven. Ils correspondent à deux âges d'or, mais ne peuvent se confondre ni dans le temps ni esthétiquement car, si les genres musicaux pratiqués sont parfois les mêmes, leurs dynamiques musicales sont, quant à elles, différentes. Le premier, porteur des valeurs de l'Ancien Régime, a été particulièrement prolixe en concertos et opéras. Le second, contemporain de la Révolution française, outre des concertos et opéras, a donné ses lettres de noblesse au quatuor à cordes, à la symphonie et à la sonate, et a servi de référence à près de deux siècles de musique européenne.