urbanisme [yrbanism] 

nom masculin

(de urbain)

Science et technique de la construction et de l'aménagement des agglomérations, villes et villages.

L'Antiquité, grecque ou romaine, le Moyen Âge, la Renaissance et l'âge classique ont connu l'art des villes : composition plastique en accord avec les valeurs dominantes de la société, favorisant par exemple la vie collective ou « mettant en scène » le pouvoir et ses institutions – mais aussi réglementation de l'occupation des sols, des façades, de la sécurité, de la circulation. Pourtant, c'est avec l'industrialisation du XIXe s. – et ses corollaires : urbanisation et prolétarisation d'une part importante de la population – que s'est imposée la nécessité d'une planification reposant sur une transformation des infrastructures (travaux d'Haussmann, à Paris, au XIXe s.), une analyse des fonctions urbaines (habitation, travail, circulation, loisirs...) et enfin des prévisions. Parallèlement à la recherche de l'adaptation de la ville aux conditions présentes et à venir s'est développé un courant utopique qui prolonge des théories révolutionnaires (Fourier, Owen...) par des projets urbanistiques inséparables d'une conception nouvelle de la société et de la vie sociale. Car l'urbanisme, reflet de la société, en reproduit les contradictions.

L'urbanisme rationnel.

D'une part, la gestion capitaliste de la ville a rencontré la résistance de théoriciens (notamm. dans les pays germaniques et anglo-saxons : Camillo Sitte, Ebenezer Howard...) attachés à une certaine idée de la cité « humaine » et à certains mythes de la nature (thème de la « cité-jardin »). D'autre part, sur la base de l'apologie du modernisme et d'une critique de l'irrationalité de l'urbanisme officiel, un courant a développé les principes d'un urbanisme scientifique. Celui-ci devient lui-même, au terme d'une longue lutte pour se faire admettre, officiel. Après les travaux précurseurs de l'architecte lyonnais Tony Garnier, Le Corbusier en est le principal promoteur en tant qu'animateur des « Congrès internationaux d'architecture moderne » – qui ont élaboré en 1933 la Charte d'Athènes – et auteur de projets comme le plan « pour une ville de 3 millions d'habitants » (1922) ou le « plan Voisin » pour Paris (1925). Cet urbanisme, dit à l'époque progressiste – parce qu'il a joué un rôle d'avant-garde avec ses thèses de la libération de l'homme par une technique dominée et mise à son service –, a produit le système autoritaire qui régit les ensembles contemporains et les « villes nouvelles » : il apparaît finalement comme une rationalisation de la décomposition de la ville (hiérarchisation des circulations, séparation des fonctions...), qui correspond à celle des rapports sociaux (« maladie de l'isolement »...).

Retour à la tradition.

Cette rationalité pervertie, adoptée par les systèmes tant capitaliste que socialiste, a donné lieu aux analyses critiques de Lewis Mumford, Henri Lefebvre, Françoise Choay, entre autres. Elle fait place, à la fin du XXe s., à des efforts pour retrouver les racines de la ville traditionnelle, tout en tenant compte de l'avènement de l'ère post-urbaine. Si les opérations de grande envergure restent aujourd'hui d'actualité, le terme d'urbanisme fait de plus en plus place à celui d'aménagement pour désigner des interventions à l'échelle des parcelles et des îlots. Inspirée de la pratique anglo-saxone de l'urban design, la démarche est plus modeste et plus prudente à l'égard des théories unifiées de la ville, mais aussi plus attentive à chaque lieu et à chaque population. Les nouveaux éclairages apportés par les sciences sociales et l'écologie s'avèrent alors essentiels pour tenter une réconciliation des hommes et de leur cadre de vie..