Russie (Fédération de)

État de l'Europe orientale et de l'Asie, 17 075 400 km2 ; 144 373 535 habitants (Russes). CAP. Moscou. LANGUE : russe. MONNAIE : rouble russe.

GÉOGRAPHIE

Le milieu naturel. La Russie, le plus vaste État du monde, est bordée au nord par l'océan Arctique et à l'est par le Pacifique, elle s'étend sur la majeure partie de l'Europe orientale et surtout sur le nord de l'Asie. D'ouest en est, on distingue quatre ensembles : la plaine russe de l'Europe orientale, les hauteurs de l'Oural, la plaine de Sibérie occidentale et la Sibérie orientale, où les plateaux (entre Ienisseï et Lena) sont bordés de chaînes et d'arcs montagneux (monts de Verkhoïansk, du Kamtchatka, chaîne de Sikhote-Aline). Sous des latitudes froides et tempérées, le climat devient de plus en plus continental vers l'est, où l'on relève des températures parmi les plus froides du globe (− 48 °C en moyenne en janvier à Verkhoïansk). La toundra borde le littoral arctique et est remplacée par la taïga au sud du cercle polaire. La forêt de feuillus assure ensuite la transition avec la steppe, aux terres noires très fertiles, qui occupe la Russie méridionale et le sud de la plaine de Sibérie occidentale.

La population. La population, majoritairement russe (plus de 80 %), compte plusieurs minorités, qui totalisent environ 30 millions de personnes. Un nombre à peu près égal de Russes vit en dehors des frontières de la Fédération (notamm. en Ukraine, au Kazakhstan, en Estonie). La majeure partie de la population est urbanisée. Moscou et Saint-Pétersbourg dominent le réseau urbain, mais une douzaine d'autres villes comptent plus d'un million d'habitants (essentiellement dans la partie occidentale du pays). Aujourd'hui, la Russie est confrontée à la constante diminution de sa population, liée notamment à une baisse de la fécondité et à une hausse de la mortalité, phénomène qui devient pour le pays un enjeu majeur.

L'économie. Les ressources naturelles sont à la mesure de l'étendue du territoire. La Russie se situe parmi les premiers producteurs mondiaux de pétrole et de gaz naturel, de minerai de fer (et aussi d'acier). Mais la situation est moins brillante dans les branches élaborées (électronique, chimie, plastique, automobile), dans l'agriculture aussi, où le volume de la production (blé et pomme de terre notamment), du cheptel (bovins et porcins) ne doit pas masquer la faiblesse des rendements. En réalité, la Russie paie la rançon d'une ancienne planification centralisée et dirigiste, ignorant les lois du marché dans un espace longtemps isolé commercialement. Elle subit les conséquences du déclin des échanges avec les territoires limitrophes et l'ancienne Europe de l'Est, à la fois clients et fournisseurs obligés. Elle souffre enfin de phénomènes plus « naturels » : les aléas climatiques, la distance (cause d'une fréquente dissociation spatiale des ressources et des besoins).

Après la dissolution de l'URSS, la Russie s'est engagée sur la voie de l'économie de marché. Mais la faible compétitivité a multiplié les fermetures d'usines et accru le chômage. Les inégalités sociales se sont développées, ainsi que (localement) les tensions ethniques. Les problèmes de l'environnement sont à l'échelle du pays et de la négligence des autorités. Pourtant, malgré ces difficultés et une absence de diversification la rendant très dépendante des exportations de ressources naturelles, l'économie russe reste une puissance notable (fragilisée toutefois aujourd'hui par les effets de la crise financière et économique mondiale).

HISTOIRE

À partir du Ve s. apr. J.-C., des tribus slaves s'installent sur le Dniepr. Elles entrent en contact avec les Varègues scandinaves, mi-pillards, mi-marchands, qui vont les dominer et, au IXe s., fonder des principautés dont les chefs sont semi-légendaires (Askold à Kiev, Riourik à Novgorod).

Les premiers États russes
882. Oleg le Sage unifie les terres russes autour de Kiev.

L'État kiévien, qui dure jusqu'en 1240, contrôle le commerce de la Baltique à la mer Noire. La pénétration du christianisme y est suivie du baptême de Vladimir Ier v. 988.

1019-1054. Sous le règne de Iaroslav le Sage, la Russie voit se développer une civilisation urbaine influencée par Byzance.

1169. Un second État russe est fondé dans le Nord-Est (région de Vladimir-Souzdal).

1238-1240. Les Mongols (Tatars) conquièrent presque tout le pays.

1242. Le grand-prince de Novgorod, Alexandre Nevski, élimine à l'O. la menace germanique en battant les chevaliers Porte-Glaive.

Tandis que le commerce de Novgorod passe sous le contrôle des marchands de la Hanse s'affirme progressivement la prééminence de Moscou, qui devient capitale politique et religieuse. Mais les princes moscovites, qui ont obtenu des Mongols en 1328 la dignité de « grand-prince », doivent disputer l'hégémonie à l'État lituanien, en pleine expansion.

L'ascension de la Moscovie
1380. Dimitri Donskoï (1362-1389) se dresse contre les Mongols et les bat à Koulikovo. Cette victoire n'est pas décisive, mais l'affranchissement de la Moscovie va être facilité par le déclin de la Horde d'Or.

1480. Ivan III (1462-1505) se proclame autocrate (qui gouverne par lui-même, indépendant).

Il se fait reconnaître « souverain de toutes les Russies » et, mettant à profit la chute de Constantinople (1453), il proclame Moscou héritière de celle-ci, et donc « troisième Rome ».

1533-1584. Ivan IV le Terrible, qui prend le titre de tsar, essaie de moderniser le pays et recourt à la terreur.

Il lutte contre la noblesse traditionnelle, les boyards, au profit d'une aristocratie de fonctionnaires, et entreprend de fixer les paysans à la terre en leur interdisant de se déplacer (1581), mesure qui est à l'origine du servage. Il reconquiert sur les Tatars la vallée de la Volga (Kazan, Astrakhan) et lance la conquête de la Sibérie.

1598-1613. Des troubles politiques et sociaux, liés à la famine, se produisent dès le règne de Boris Godounov (1598-1605). Après sa mort, l'anarchie se développe, mise à profit par les Suédois et les Polonais, qui font couronner leur candidat au trône de Russie (1610).

1613. Une assemblée nationale (zemski sobor) dénoue la crise en élisant Michel III Romanov.

Ses successeurs luttent contre leurs puissants voisins (Pologne, Suède) et affrontent révoltes paysannes et troubles religieux (raskol, ou schisme des vieux-croyants).

1682-1725. Pierre le Grand mène de façon autoritaire une politique de réformes inspirée de l'Occident.

Il renforce son pouvoir, réorganise l'armée et les Finances, fonde Saint-Pétersbourg et crée l'Empire russe (1721).

L'Empire russe. L'œuvre de Pierre le Grand ne touche qu'une minorité de la population ; elle est partiellement abandonnée par ses successeurs, sous le règne desquels se suivent révolutions de palais et ministres allemands.

1741-1762. Sous le règne d'Élisabeth (fille de Pierre le Grand), la Russie, alliée de la France et de l'Autriche pendant la guerre de Sept Ans, bat Frédéric de Prusse, qui est sauvé de la défaite par l'avènement de Pierre III.

1762-1796. Catherine II, après avoir éliminé son mari Pierre III, règne en despote éclairé.

Liée aux philosophes (Voltaire, etc.), la « Grande Catherine » fait des réformes qui visent essentiellement au renforcement du pouvoir impérial, centralisant l'Administration et favorisant le développement économique. S'appuyant sur la noblesse, elle renforce le servage, ce qui provoque des révoltes. Enfin, elle agrandit la Russie aux dépens de l'Empire ottoman (1768-1792) et de la Pologne (partages de 1772, 1793 et 1795).

1796-1815. La Russie joue un rôle actif en Europe.

Paul Ier (1796-1801) participe aux coalitions contre la France, puis s'oppose à l'Angleterre. Alexandre Ier (1801-1825), vaincu par Napoléon, s'allie avec lui (Tilsit, 1807), puis prend une part active à sa chute (campagne de Russie, 1812). Il participe au congrès de Vienne (1815), et, instigateur de la Sainte-Alliance, il se fait le gardien de l'ordre établi.

1825-1855. Nicolas Ier mène une politique autoritaire en matant la conspiration « décabriste » (1825) et la révolte polonaise (1831). Il poursuit l'expansion russe dans le Caucase. Mais les ambitions russes devant la faiblesse ottomane inquiètent l'Angleterre, et la guerre de Crimée est un échec pour la Russie.

1855-1881. Alexandre II modernise son empire : le tsar abolit le servage (1861), crée des assemblées élues, les « zemstvos », et réforme la justice. Il aide les peuples des Balkans à se libérer des Turcs et commence la conquête de l'Asie centrale.

Ses réformes sont jugées insuffisantes et les libéraux se tournent vers l'action révolutionnaire. Le tsar est assassiné en 1881.

1881-1894. Alexandre III mène une politique de réaction autocratique qui accentue le divorce avec un pays en pleine évolution économique et sociale.

Il impose une russification systématique et traque les opposants. Si l'industrie progresse, la misère paysanne s'accroît, sauf pour une minorité : les koulaks.

1894-1917. La même politique est poursuivie par Nicolas II, mais les oppositions s'amplifient (particulièrement parmi les ouvriers, touchés par le marxisme).

La défaite militaire contre le Japon favorise la révolution de 1905. Après avoir fait des concessions libérales, Nicolas revient à l'autocratisme. La participation de la Russie à la Première Guerre mondiale et les difficultés qui en découlent accroissent le mécontentement et entraînent la révolution de 1917. Le succès de celle-ci est suivi de la chute du tsarisme.

La Russie soviétique
1918. Création de la République socialiste fédérative soviétique de Russie (RSFSR).

1922. La RSFSR adhère à l'URSS (→ URSS). Constituant dès lors le centre de l'Union soviétique, la Russie joue un rôle fédérateur à l'égard des républiques périphériques (14 depuis la Seconde Guerre mondiale), dans lesquelles l'emploi de la langue russe et l'établissement des Russes sont considérés comme les vecteurs de la consolidation des valeurs soviétiques. Cependant, après 1985, les aspirations à la démocratie se développent rapidement, entraînant une rupture avec le système soviétique.

1990. Le Soviet suprême issu des premières élections républicaines libres élit Boris Ieltsine à sa présidence.

1991. B. Ieltsine, élu président de la république de Russie, s'oppose au putsch tenté contre Gorbatchev (août).

La Fédération de Russie. Après la dissolution de l'URSS (déc.), la Russie adhère à la CEI, au sein de laquelle elle cherche à jouer un rôle prépondérant. Elle succède à l'URSS comme membre permanent du Conseil de sécurité de l'ONU et prend le nom officiel de « Fédération de Russie ». Le passage à l'économie de marché entraîne l'aggravation de la pauvreté et de la corruption.

1993. B. Ieltsine dissout le Soviet suprême (sept.). À l'issue du référendum et des élections législatives de déc., une nouvelle Constitution entre en vigueur.

1994-1996. Les forces armées interviennent contre la Tchétchénie sécessionniste.

1996. B. Ieltsine est réélu à la présidence. Mais, affaibli par la maladie, il ne peut assurer qu'une gestion incertaine du pouvoir qui exacerbe les rivalités politiques dans un pays en proie à une grave crise économique et financière.

1999. Les troupes russes lancent une nouvelle offensive en Tchétchénie. La coalition présidentielle, conduite par le Premier ministre Vladimir Poutine, fait jeu égal, lors des élections législatives (déc.), avec les communistes. B. Ieltsine démissionne (31 déc.) et nomme V. Poutine président par intérim.

2000. V. Poutine est élu président de la Russie (mars).

2001. Après les attentats du 11 sept., la Russie, appelant à une lutte commune contre le terrorisme, se rapproche des États-Unis et des pays occidentaux.

2004. V. Poutine est réélu à la tête de la Fédération.

2008. Dmitri Medvedev est élu président de la Russie (mars). V. Poutine devient Premier ministre. À la suite d'une offensive lancée par les autorités de Tbilissi dans la province séparatiste d'Ossétie du Sud, la Russie mène une guerre éclair en territoire géorgien (août). Moscou reconnaît l'indépendance de l'Ossétie du Sud ainsi que celle de l'Abkhazie, une autre province sécessionniste dans le nord-ouest de la Géorgie.

2012. V. Poutine est de nouveau élu président (réélu en 2018) à la suite d'une élection très contestée par l'opposition démocratique, qui tente avec peine de rassembler ses forces. D. Medvedev prend le poste de Premier ministre.

Depuis 2014. Après l'annexion de la Crimée et l'intervention dans l'est de l'Ukraine, les relations avec les États occidentaux se tendent. L'engagement militaire de la Russie dans la guerre civile en Syrie, pour soutenir le régime de Bachar al-Asad, change également le rapport de forces dans ce conflit.

2020. Alors qu'une réforme de la Constitution est lancée (puis approuvée par référendum), le Premier ministre D. Medvedev démissionne, remplacé par Mikhaïl Michoustine.

2022. Le 24 févr., la Russie envahit le territoire ukrainien. Des sanctions lui sont aussitôt imposées par les États européens et les États-Unis.