socialisme [sɔsjalism] 

nom masculin

Dénomination de diverses doctrines économiques, sociales et politiques, liées par une commune condamnation de la propriété privée des moyens de production et d'échange : Socialisme utopique de Charles Fourier. Socialisme scientifique (= marxisme).

L'histoire des théories.

Le mot socialisme, qui existe dès le XVIIIe s., commence à être fréquemment employé en France et en Grande-Bretagne autour des années 1830. Il désigne des théories comme celles de Claude Saint-Simon, Charles Fourier, Robert Owen et traduit un refus global de l'organisation sociale qui se met en place avec l'industrialisation et le capitalisme, marqués par l'exploitation à outrance du travail de l'homme, femmes et enfants compris, l'insécurité dans les conditions de travail, l'entassement urbain, l'absence de toute protection sociale, l'interdiction de toute coalition ouvrière. Vers 1848, la désignation de « socialiste » s'applique à des systèmes philosophiques idéalistes généraux, qui ont pour idéal commun l'accès – avec ou sans violence – à un système social respectant l'individu : certains théoriciens préconisent la libre association pour la production et la consommation, d'autres, l'organisation du travail par ceux que la société reconnaît comme compétents. Le terme de socialiste commence à s'opposer à celui de communiste, qui désigne le partisan d'une théorie visant à supprimer les classes sociales, à transformer puis à supprimer l'État comme expression de leurs rapports conflictuels, et à rendre égaux les hommes. Le mot communiste est alors davantage réservé aux théoriciens tels que E. Cabet, P. Leroux puis Marx. Chez ce dernier, qui s'affirme socialiste scientifique, le socialisme désigne une phase de l'évolution historique à venir, où les classes auront disparu : les continuateurs de Marx qualifieront au XXe s. de « socialistes » les régimes qui ont pris le pouvoir au nom du parti censé représenter le prolétariat, mais sans jamais tenter d'abolir ni les classes sociales ni l'État. Ceux qui, dès le XIXe s., se réclament du socialisme sans se rattacher au mouvement internationaliste qui s'affirme marxiste appartiennent à des courants de pensée très divers. En Allemagne, le courant politique dit socialisme de la chaire, parce que soutenu par les professeurs d'université, qui apparaît en 1872, préconise la toute-puissance de l'État. En France, nombre de catholiques pensent que l'Évangile comporte un message spirituel où l'amour du prochain est indissociable du besoin de justice sociale (La Mennais) et qu'il doit être mis en pratique par les chrétiens eux-mêmes. Ce courant, qui va de H. Lacordaire et F. Ozanam à M. Sangnier puis à E. Mounier, peut être appelé socialisme chrétien. Les opposants à Marx au sein de la Ire Internationale ont eu pour point commun le souci d'exalter la liberté individuelle. P. J. Proudhon, M. Stirner, M. Bakounine se situent dans cette ligne, dite socialisme libertaire.

Les partis socialistes et sociaux-démocrates.

Après l'échec de la IIe Internationale et face à la IIIe Internationale (1919), les socialistes qui ont refusé le modèle soviétique fondent en 1923 l'Internationale ouvrière socialiste et, en 1951, l'Internationale socialiste. Après les années 1920-1925, et plus encore après la Seconde Guerre mondiale, ils manifestent vigoureusement leur opposition au socialisme soviétique. Leur objectif commun est de faire progresser la situation par des lois sur la famille, la sécurité sociale, le plein emploi, le logement. Nombre de ces points figurent aux programmes des partis, qu'ils s'appellent « socialistes » ou « sociaux-démocrates » : partis espagnol (fondé en 1879, mais dont la majorité a refusé en 1921 d'adhérer au communisme), italien (fondé en 1892, dissous en 1926 et recréé en 1947), belge (fondé en 1945 après la dissolution du parti ouvrier belge), danois (fondé en 1871), suédois (fondé en 1889, d'abord favorable puis hostile au marxisme après 1920), norvégien (fondé en 1887, communiste de 1919 à 1923), finlandais (fondé en 1899 et dont l'aile communiste se sépare en 1919), allemand (social-démocrate, fondé en 1875, séparé des communistes en 1922, dissous en 1933 et recréé en 1946 sous le nom de SPD), français (fondé en 1971 sur les ruines de la SFIO), autrichien, grec, portugais.

La plupart de ces partis, tout en reconnaissant la réalité de la lutte des classes, refusent la référence aux thèses marxistes et reprochent aux régimes dits « socialistes », qui se réclament du marxisme-léninisme, leurs pratiques totalitaires et expansionnistes. L'affaiblissement ou la disparition des partis communistes dans la plupart des pays du monde après les années 1990 n'ont pas entraîné de renforcement nettement perceptible des partis socialistes.