bourgeoisie [burʒwazi] 

nom féminin

(de bourgeois)

  1. Ensemble des personnes qui n'exercent pas un travail manuel industriel ou agricole et dont les revenus sont relativement élevés et réguliers : Haute, moyenne et petite bourgeoisie.
  2. Selon le marxisme, classe sociale détentrice des moyens de production et d'échange dans le régime capitaliste (par opp. à prolétariat).

L'apparition au Moyen Âge.

C'est au XIe s. que se constitue, dans une Europe marquée par un essor économique progressif, une nouvelle catégorie socio-économique. Le bourgeois est d'abord l'habitant d'un bourg, agglomération créée à côté d'une cité épiscopale, auprès d'un monastère ou d'un château. C'est avant tout un citadin qui assure son existence soit par le métier qu'il pratique, soit par le commerce. Le bourgeois est donc le contraire d'un terrien ; tout naturellement, il demande au seigneur les libertés nécessaires à l'exercice de ses fonctions et les obtient, parfois à la suite de conflits violents, sous la forme de chartes de franchise applicables à l'ensemble de la bourgeoisie d'une commune. À partir du XIIe s., une élite se dégage : le patriciat, frange la plus riche de la bourgeoisie, qui monopolise le gouvernement de la ville et doit faire face à de nombreux soulèvements sociaux, particulièrement dans les régions d'Europe où le développement économique est le plus avancé (Flandres, nord de l'Italie). En Europe septentrionale, l'élite commerçante des ports les plus importants se regroupe dans une communauté économique (la Hanse), dont la puissance politique s'étend de la Baltique à la mer du Nord.

L'essor (xvie-xixe  s.).

À partir du XVIe s., le commerce colonial offre à la bourgeoisie de nouvelles possibilités d'enrichissement. Jouissant d'un pouvoir économique et culturel accru, elle se heurte aux privilèges des membres du clergé et de la noblesse et revendique un rôle politique à la hauteur de ses responsabilités économiques. Menant la lutte contre l'Ancien Régime, elle joue ainsi un rôle déterminant dans les révolutions anglaise, américaine et française des XVIIe et XVIIIe s. Associée au développement du capitalisme, que favorise la révolution industrielle, la bourgeoisie étend alors son influence tout au long du XIXe s., encourageant le libéralisme politique (régime parlementaire, libertés individuelles) et économique (plus ou moins poussé selon les pays).

En France, l'ascension de la bourgeoisie est facilitée par le développement de l'administration royale, qui s'appuie sur elle contre la noblesse. Les litiges qui l'opposent aux deux ordres privilégiés se font jour au sein des états généraux, où le tiers état joue un rôle de plus en plus actif. Ainsi, en 1789, la puissance du tiers état, encadré par la bourgeoisie d'affaires et la bourgeoisie de robe (aux fonctions principalement administratives), est telle que la Révolution française sera une révolution bourgeoise. Dès lors, la bourgeoisie s'installe dans tous les corps de l'État à la faveur de l'organisation napoléonienne ; en 1830, elle triomphe définitivement de la réaction aristocratique liée à la Restauration et s'impose tout au long du XIXe s., sans que l'avènement du suffrage universel (1848) limite son pouvoir.

La contestation de la bourgeoisie (xixe-xxe s.).

La bourgeoisie subit cependant les attaques des théoriciens socialistes, Proudhon et surtout Karl Marx, qui l'opposent, en tant que classe détentrice des moyens de production, à la masse ouvrière exploitée. Elle doit dès lors compter avec l'essor des mouvements socialistes et syndicalistes, dont l'action, fondée sur la lutte des classes, vise au renversement de l'ordre social. Ainsi, dans les régimes communistes mis en place au XXe s. après la révolution russe de 1917, la bourgeoisie, considérée comme « ennemi de classe », se voit dépossédée de ses pouvoirs. Ailleurs, son influence reste dominante dans les pays industrialisés, dont l'évolution est cependant avant tout caractérisée par une forte extension des « classes moyennes ».