nom masculin
(de réel, d'apr. le lat. realis)
Le réalisme, qui correspond à l'apogée de la civilisation bourgeoise, marque une réaction contre le romantisme et ses excès. Influencé par le développement des sciences, qui engendrent le respect des faits, la précision dans l'observation et l'analyse, le courant réaliste trouva son expression philosophique dans le positivisme d'Auguste Comte et le déterminisme de Taine. Il s'incarne en littérature dans la recherche de la « sincérité dans l'art » avec Champfleury et Duranty et, bien qu'ils s'en défendent parfois, Flaubert, les Goncourt, Maupassant et Zola, qui le fera évoluer vers le naturalisme. Présidant à la création du drame bourgeois et de la comédie de mœurs (É. Augier, A. Dumas fils), le réalisme revêt une forme moins rigoureuse en Angleterre (Thackeray, G. Eliot), en Italie (Verga), en Allemagne (G. Hauptmann) et en Scandinavie (G. Brandes).
Le XIXe siècle.
On a parlé de réalisme, en art, à propos notamment de courants qui se sont manifestés au XVIIe s. en réaction contre le maniérisme. Ils étaient représentés par le Caravage, les Carrache, en Italie ; Zurbarán, Velázquez, Murillo, Ribera, en Espagne ; Hals, Vermeer, certains peintres de genre et de paysages, en Hollande ; les Le Nain et autres « peintres de la réalité », en France ; etc. Mais le terme désigne plus particulièrement une tendance apparue au milieu du XIXe s. en France, qui manifeste une double réaction, contre le classicisme académique et contre les aspirations romantiques. Ce courant est marqué par diverses influences. La peinture en plein air de l'école de Barbizon, les idées positivistes ainsi que le socialisme naissant incitent Courbet à privilégier la substance du vécu quotidien, Millet à se consacrer à la vie et au travail des paysans, Daumier à dépeindre le peuple de Paris et à fustiger juges et notables. Puis, dans le climat du naturalisme de Zola, Manet apporte sa marque au mouvement avant de rejoindre, tout comme Degas, une voie picturale divergente, celle de l'impressionnisme. En Europe, le courant réaliste touche divers pays, que ce soit avec les peintres de l'école de La Haye (Jacob Maris), le Belge Meunier, les macchiaioli italiens (Giovanni Fattori), le Russe Ilia Repine, etc.
Depuis la Première Guerre mondiale.
Au XXe s., en réaction contre les forces dominantes de la plastique pure et de l'abstraction, le réalisme réapparaît d'abord en Allemagne avec la nouvelle objectivité (Max Beckmann, Otto Dix), vision sans complaisance, sombre et violente, de la société au lendemain de la Première Guerre mondiale. À partir des années 1930, le réalisme socialiste de l'URSS, puis, plus tard, celui des démocraties populaires, se révèle ni plus ni moins qu'un embrigadement idéologique et un académisme stérile. Dans les années 1960, en même temps que le pop art américain, le nouveau réalisme européen (Y. Klein) porte un regard sociologique sur le monde par un art de l'assemblage (Daniel Spoerri, Tinguely, Raysse), de l'« accumulation » (Arman), de la « compression » (César) ou encore de l'emballage (Christo et Jeanne-Claude), souvent à partir d'objets de rebut récupérés dans l'espace public. Enfin, au tournant de la décennie, le courant hyperréaliste américain (Duane Hanson), préparé dès l'entre-deux-guerres par l'œuvre de Hopper, cherche à produire un effet d'étrangeté sur des scènes banales du quotidien, par une précision photographique déroutante.
Le réalisme cesse ensuite progressivement d'être une problématique explicite en art, de même que s'estompe l'opposition entre figuratif et non figuratif à la faveur de l'élargissement et de la quasi-généralisation de la notion de ready-made (par ex. avec la nouvelle sculpture anglaise des années 1980, la sculpture d'objet et le néo-pop [Koons]).